Un détenu fiché, visé par une notice rouge d’Interpol, évadé sans effraction, sans arme, sans complicité armée, simplement en se glissant dans un sac. Voilà où nous en sommes. Samedi, Elyazid A., 20 ans, s’est évaporé de la maison d’arrêt de Corbas, dans le Rhône. Depuis, plus de trace. Mais ne vous inquiétez pas : Interpol a lancé une notice rouge. Une pastille rouge contre un fantôme. L’administration pénitentiaire, elle, parle d’une « accumulation d’erreurs ». Le mot est faible.
Ce jeune homme n’est pas un vulgaire voleur de mobylettes. Il est mis en examen pour « meurtre en bande organisée », « association de malfaiteurs », et « transport de matériel de guerre ». Rien que ça. Et il a suffi d’un sac trop grand et d’un contrôle trop vague pour qu’il sorte de prison comme on sort d’un vestiaire.
La comparaison avec Mohamed Amra, évadé en mai 2024 après une embuscade sanglante, vient immédiatement à l’esprit. À une différence près : ici, pas besoin de Kalachnikov ni de commando. Seulement l’incompétence tranquille d’une administration qui baisse les yeux et des protocoles aussi poreux que le grillage d’un potager municipal.
À ce stade, on ne parle plus de dysfonctionnement mais d’effondrement. On confie à la prison la garde d’individus capables de tuer en meute, de se fournir en armes de guerre, et l’on découvre après coup que le niveau de vigilance est à peine supérieur à celui d’un internat de province. Le ministre de la Justice ? Absent. Le directeur de l’administration pénitentiaire ? Navré, bien sûr. Et pendant ce temps, les Français, eux, comprennent que les criminels ne craignent plus ni les barreaux, ni la République.
Dans un pays où les honnêtes gens doivent justifier de tout et obtenir des autorisations pour chaque clou planté dans un mur, un multirécidiviste peut se planquer dans un sac et sortir de prison. Voilà l’ordre que nous promettent les gestionnaires du désordre. On nous parle de « République en marche », mais c’est surtout le crime qui court – et la justice qui traîne la patte.