Dans l’affaire Historock, Montrouge vient d’offrir un spectacle assez révélateur, et ce n’est pas celui que les élèves de CM1 et CM2 attendaient. Dès que des syndicats très politisés ont parlé de « dévoiement de l’Histoire » ou de « propagande réactionnaire », la municipalité a plié. Résultat : un show pédagogique annulé, et un message limpide envoyé aux enseignants comme aux enfants : l’Histoire n’est acceptable que filtrée par un prisme idéologique particulier.
On se demande ce qui effraie tant dans cette représentation. Peut-être le fait qu’elle ouvre sur la naissance de la nation française et se termine sur de Gaulle. Peut-être que dix chansons évoquent l’héritage chrétien, dix autres l’héritage laïc. Peut-être surtout qu’elle assume une vision cohérente de notre récit national, c’est-à-dire exactement ce que certains ne supportent plus. Leur obsession consiste à traquer partout un supposé « roman national » dès que l’on sort du discours victimaire, repentant ou déconstructiviste.
Le plus ironique dans cette panique militante, c’est que le spectacle est joué depuis des années dans des dizaines de villes, sans incidents, sans controverse majeure. Les élèves y découvrent des chevaliers, des sans-culotte, des poilus, Léon Blum, et chantent même « Front pop, pop, populaire ». On a connu propagande d’extrême droite plus évidente.
Mais à Montrouge, il aura suffi que des groupes militants dégainent les mots-épouvantails (« Maurras », « extrême droite », « catéchisme ») pour que la mairie renonce. La caisse des écoles, pourtant favorable au spectacle après examen, a finalement reculé. Même les enseignants ont choisi le boycott. Dans ce climat, la moindre initiative culturelle un peu trop enracinée devient suspecte.
La scène est d’autant plus révélatrice que Dimitri Casali, créateur du spectacle, n’est pas un agitateur politique mais un professeur d’histoire qui a tenté de renouer avec l’attention des élèves en mêlant musique contemporaine et grands récits fondateurs. La gauche locale préfère y voir une « offensive réactionnaire ». On connaît la chanson : dès qu’on parle de transmettre un héritage, certains crient à la menace fasciste.
L’épisode confirme, une fois de plus, l’étau idéologique qui s’installe dans le monde éducatif. L’Histoire n’est plus un terrain d’apprentissage, mais un champ de bataille. Ce qui compte n’est plus la cohérence du savoir, mais l’alignement sur une vision politique particulière. Montrouge vient d’illustrer ce glissement : pour ne pas déplaire à des minorités très organisées, on sacrifie une opportunité pédagogique pour 1600 enfants.
Pendant ce temps, ailleurs, des maires continuent de programmer Historock et décrivent des salles entières d’élèves vibrant ensemble au son de la Marseillaise. À Montrouge, on a préféré la querelle militante à cette communion culturelle. Mauvais signe pour un pays qui peine déjà à transmettre ce qui le fonde.