“J’entends cette dame dans la cour. Le temps que la personne parte, la lumière du couloir reste allumée. La lumière s’éteint ensuite. Je vois immédiatement sous ma porte une lueur orangée qui bougeait.” Cette “dame”, c’est Essia B., qui vient de quitter l’immeuble où elle réside au 17 bis rue Erlanger, dans le 16e arrondissement de Paris. Juste avant, elle a, selon les enquêteurs, allumé un feu devant la porte de son voisin. Valentine habite en face et a tout entendu.

Quatre ans quasiment jour pour jour après les faits, la cour d’assises de Paris va juger Essia B. pour cet incendie qui a coûté la vie à 10 personnes. Dix habitants pris dans le piège des flammes qui se sont propagées rapidement ou qui ont sauté de leur fenêtre, se pensant perdus. Une question est au cœur des débats: comment une dispute de voisinage a-t-elle pu être à l’origine d’un tel drame?

Il est 00h36 cette nuit-là quand Valentine appelle les pompiers. Cela fait plus d’une heure qu’elle entend des cris sur son palier. À l’origine, de la musique trop forte mise par l’une de ses voisines, Essia B. Le voisin, caporal-chef au sein des pompiers de Paris, dont l’appartement est mitoyen au sien, lui demande de baisser le son. Pour simple réponse, lui et sa compagne n’obtiennent que des insultes: “sale pute”, “connard de pompier, je vais te crever”.

Loin de se calmer, Essia B. augmente à nouveau le son. Le couple se décide à aller dormir ailleurs, après que des projectiles ont été lancés sur leur volet. Il en est empêché par la voisine, qui se trouvait sur le palier, tambourinant à leur porte tout en les insultant. Les deux jeunes gens finissent par appeler les policiers qui vont raccompagner Essia B. chez elle. Elle ressort quelques minutes plus tard. Plusieurs témoins l’entendent proférer des menaces.

La suspecte est déjà connue des services de police. En 2016, elle a mis le feu à une boutique de vêtements pour voler la caisse. Elle avait alors bénéficié d’un classement sans suite, en raison de son état mental. Quelques semaines plus tard, elle avait brûlé avec un briquet et une bouteille de gaz lacrymogène un pompier qui venait la secourir. Dans son sang sont retrouvés du cannabis, des antipsychotiques et des anxiolytiques.

“C’est moi qui ai mis le feu au bâtiment (…) J’ai mis le feu pour embêter mon voisin.”

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