En France, une statistique révélée par une enquête du Figaro glace le sang : toutes les trois minutes, une pièce d’automobile disparaît. Banquettes, optiques, pots catalytiques, batteries ou encore jantes, tout y passe. Plus de 100.000 plaintes recensées en un an, et l’on sait que la réalité est bien supérieure à ce chiffre. Voilà le portrait d’une insécurité devenue banale, et qui touche désormais chacun de nous au coin de la rue, sur le parking de la résidence, jusque dans les sous-sols surveillés des copropriétés.
Il n’y a pas si longtemps, le vol de voiture relevait du fait divers. Désormais, c’est une industrie parallèle, organisée, professionnalisée, qui alimente des filières internationales. Les pièces partent en Afrique de l’Ouest, au Maghreb, en Russie. La France, bon élève de Bruxelles, subit les pénuries et la flambée des prix. Mais elle reste incapable de protéger ses propres citoyens des réseaux criminels qui prospèrent au grand jour.
Le scénario est toujours le même : vous retrouvez votre véhicule dépouillé, parfois posé sur ses disques de freins, parfois vidé de sa banquette arrière pour transformer un utilitaire en voiture particulière, le tout écoulé à prix d’or dans des marchés « moins tatillons ». Les forces de l’ordre, sous-dotées, se contentent d’enregistrer des plaintes. Les rares arrestations concernent des adolescents interpellés en flagrant délit, déjà multirécidivistes, circulant sans permis dans des véhicules de luxe volés. Et les ministres ? Ils annoncent des plans « ambitieux », qui restent lettres mortes.
Les victimes, elles, se tournent vers leurs assurances… quand elles en ont les moyens. Franchise à payer, primes qui explosent, délais interminables pour obtenir une pièce neuve. Le tout dans un contexte où les constructeurs augmentent leurs tarifs de 70 % en cinq ans pour des blocs optiques ou des batteries. Double peine : dépouillés dans la rue, rançonnés au garage.
Qui sont ces voleurs ? Les témoignages concordent : réseaux de l’Est pour les catalyseurs, filières du Maghreb pour les accessoires, bandes organisées en Seine-Saint-Denis ou à Marseille pour le reste. Un écosystème criminel florissant, parfaitement intégré à la mondialisation. La France, elle, s’y résigne, impuissante, comme si voir disparaître ses pièces automobiles faisait désormais partie du quotidien ordinaire.
Pendant que les honnêtes gens paient, les voyous s’enrichissent. Le pillage se déroule en silence, mais il dit tout d’une société livrée à elle-même : insécurité quotidienne, impuissance publique, abandon des classes moyennes qui, chaque matin, descendent dans leur garage avec la crainte de ne plus retrouver leur véhicule intact. Un vol toutes les trois minutes : derrière ce chiffre, c’est bien une nation entière que l’on dépossède.