Parcoursup : l’angoisse automatisée

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Chaque année, c’est le même rituel. Même stress, mêmes angoisses, mêmes réponses évasives. Parcoursup ouvre, les familles retiennent leur souffle, et l’opacité s’installe. Huit ans après sa création, la plateforme d’orientation post-bac continue de trier des dizaines de milliers de lycéens sans jamais lever complètement le voile sur ses critères réels.

Algorithme, fiche Avenir, lettres de motivation, appréciations diverses : tout est là, nous dit-on. Tout serait pris en compte. Tout serait examiné. En réalité, personne ne sait précisément ce qui fait basculer un dossier du bon côté… ou du mauvais.


La boîte noire de l’orientation

Officiellement, Parcoursup progresse vers la transparence. Chaque année, de nouveaux indicateurs apparaissent, de nouveaux onglets s’ouvrent, de nouveaux graphiques rassurent. Mais l’essentiel reste hors champ. L’algorithme initial, les pondérations exactes, le poids réel des appréciations ou du lycée d’origine demeurent inaccessibles.

Les familles savent ce qu’elles déposent. Elles ignorent ce qui est réellement lu, ce qui est survolé, ce qui est éliminé dès le premier tri informatique. On parle d’examen individualisé, mais on admet sans détour qu’un premier filtre automatique écarte ou valide des milliers de dossiers en quelques secondes.

La fiche Avenir, juge invisible

C’est sans doute l’élément le plus problématique du système. La fiche Avenir, rédigée par les enseignants et le chef d’établissement, pèse lourd. Très lourd. Et pourtant, elle reste invisible pour les familles jusqu’à la fin du processus.

On invoque la liberté pédagogique, la protection contre la pression parentale, la bienveillance professionnelle. Argument commode. En pratique, cela signifie qu’un avis défavorable, une appréciation maladroite ou une réserve implicite peuvent peser sur l’avenir d’un élève sans qu’il n’en ait connaissance.

Impossible de corriger. Impossible de contester. Impossible même de comprendre.

Des refus sans visage

Chaque année, plus de 100 000 bacheliers se retrouvent sans proposition à l’issue de la procédure principale. Ils ont pourtant travaillé, obtenu leur diplôme, rempli consciencieusement leurs vœux. Mais Parcoursup a décidé autrement.

Pourquoi tel élève est admis ici et pas là ? Pourquoi ce dossier, pourtant conforme aux attendus, disparaît dans les limbes numériques ? La réponse est toujours la même : « l’algorithme », « la capacité d’accueil », « la forte demande ». Traduction : circulez.

Un système qui alimente la défiance

Parcoursup ne manque pas de défenseurs. Ils expliquent qu’il n’existe pas d’alternative, que le nombre d’étudiants a explosé, que le tri est inévitable. Sans doute. Mais un tri opaque nourrit mécaniquement la suspicion.

Lorsqu’un système décide sans s’expliquer, il fragilise la confiance. Lorsqu’il affecte l’avenir de toute une génération sans offrir de lisibilité, il alimente le sentiment d’arbitraire. Et lorsqu’il exige une adhésion totale tout en refusant la transparence complète, il devient un symbole.

Parcoursup n’est pas seulement une plateforme. C’est une machine à angoisse institutionnelle, un révélateur brutal d’une école qui promet l’égalité des chances tout en organisant la sélection derrière un écran.

Et tant que la lumière ne sera pas faite sur ce qui décide réellement du sort des élèves, la défiance continuera de grandir.

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