Le Royaume-Uni, naguère bastion du bon sens et de la tempérance démocratique, s’apprête à franchir un nouveau seuil dans l’effacement de ses repères : offrir le droit de vote aux mineurs de 16 ans. Officiellement, il s’agirait de « moderniser la démocratie ». En réalité, c’est une fuite en avant. Une tentative pathétique et dangereuse de capter un électorat malléable, façonné par les réseaux sociaux, les slogans progressistes et les injonctions émotionnelles.
Le vice-premier ministre Angela Rayner l’a annoncé avec emphase : les jeunes « travaillent, paient des impôts, servent dans l’armée ». Et donc, pourquoi ne pas leur confier aussi le destin d’un royaume ? Comme si la précocité dans certaines responsabilités justifiait mécaniquement une maturité politique. Cette vision utilitariste de la citoyenneté oublie une chose essentielle : voter n’est pas un geste technique, c’est un acte de discernement.
À 16 ans, on découvre à peine le monde. On oscille entre influence des pairs, instabilité affective et ignorance historique. L’école elle-même n’a pas encore, sauf exception, formé l’esprit critique. Mais peu importe. Le nouveau clergé progressiste a décidé qu’il fallait « impliquer les jeunes ». Une jolie formule pour maquiller ce qui s’apparente à un coup politique : étendre l’électorat aux plus influençables, dans l’espoir de faire basculer les urnes vers le camp du Bien.
C’est le même schéma partout : on ne relève pas le niveau, on abaisse les exigences. On ne transmet plus la rigueur, on flatte l’instinct. Au lieu de former des adultes capables de porter une nation, on écoute les humeurs adolescentes. Bientôt, pourquoi pas, proposer un vote dès 14 ans ? Ou une « citoyenneté partagée » dès la maternelle ? L’absurde n’a plus de limite quand la modernité est prise pour une fin en soi.
On nous parlera du Brésil, de l’Autriche ou de la Belgique, où le vote à 16 ans existe déjà. Mais sont-ce vraiment des modèles ? Faut-il rappeler que ces pays sont eux aussi engagés dans une déliquescence politique préoccupante, où le relativisme et le clientélisme remplacent l’intérêt général ?
Le vote est un privilège civique, pas un gadget de marketing politique. En le diluant dans le jeunisme, c’est l’autorité même de la démocratie qu’on affaiblit. Un peuple qui donne le pouvoir de choisir à ceux qui n’ont pas fini de se construire est un peuple qui ne croit plus en lui-même.
Quand on donne le droit de vote à des adolescents, ce n’est pas la jeunesse qu’on honore. C’est la nation qu’on trahit.