Un enfant mort. Trente personnes contaminées. Cinq boucheries fermées. Et désormais, la « preuve irréfutable » : le lien biologique entre les viandes vendues et la bactérie E. coli est établi. À Saint-Quentin, dans l’Aisne, l’affaire prend une tournure grave – non seulement sur le plan sanitaire, mais aussi sur celui de la responsabilité politique, de la transparence des filières alimentaires… et de l’évitement médiatique.
Une hécatombe évitable
Tout commence par un drame : 30 personnes contaminées, dont 29 enfants, dix d’entre eux développant un syndrome hémolytique et urémique (SHU), complication grave de l’infection. L’un des petits malades, une petite fille âgée de 11 ans, en est mort le 11 juin. Le pays, lui, continue d’entendre parler de bien-être animal, de droit à l’alimentation, d’inclusivité. Mais la vérité éclate : c’est bien une série de boucheries qui est au cœur du problème. Et pas n’importe lesquelles.
Cinq boucheries fermées. Toutes halal
L’information est là, brute, sobrement glissée dans les communiqués officiels, avec une discrétion qui tranche avec l’ampleur du drame. Une seule enseigne – l’Intermarché de Gauchy – a été blanchie. Les cinq autres, toutes spécialisées dans la viande halal, sont toujours fermées. Les analyses, menées par l’Institut Pasteur, sont sans appel : séquençage génomique, traçabilité parfaite, correspondance établie entre les bactéries présentes sur les lieux de vente et celles retrouvées dans l’organisme des malades. L’origine du drame est identifiée.
Pourquoi ce silence ?
Dans un autre contexte, avec d’autres enseignes, la France entière serait en émoi. Les plateaux télé se rempliraient d’experts, de politiques, de juristes. Là, motus. Silence prudent. Comme s’il ne fallait surtout pas « stigmatiser ». Comme si la gravité du scandale devait être étouffée pour ne pas alimenter de supposés amalgames.
Mais la réalité n’a que faire du politiquement correct. Quand un enfant meurt à cause d’un manquement dans une filière alimentaire, l’État doit rendre des comptes. Et s’il s’avère que certaines pratiques de conservation, d’hygiène ou de contrôle sont insuffisantes dans certaines boucheries halal, cela doit être dit, su, corrigé et sanctionné.
Une enquête judiciaire en cours : il était temps
Le parquet de Paris a été saisi. L’enquête déterminera les responsabilités, et il faut l’espérer : aucune complaisance, aucun calcul électoral, aucun tabou communautaire ne doivent parasiter l’établissement des faits. Si la vie d’un seul enfant a été fauchée par négligence, c’est tout le système de contrôle qui doit être revu – et la justice doit être implacable.
À force de détourner les yeux au nom du vivre-ensemble, c’est le vivre-tout-court qu’on met en péril. Il ne s’agit pas d’accuser à l’aveugle, mais de regarder lucidement ce qui a conduit à la mort d’un enfant. Et d’agir.