J’ai bien conscience en écrivant ces lignes que beaucoup de mes lecteurs les désapprouveront. Oui, il est probable que beaucoup de mes lecteurs ont manifesté une certaine satisfaction à la vue de la gifle reçue par le président de la république. Ce n’est pas mon cas.

Je lis et j’entends la force du sentiment de rejet qu’inspire Emmanuel Macron à une partie non négligeable de la population. Ce sentiment n’est pas nouveau, et il culmina lors de la crise des Gilets Jaunes. La manifestation de ce rejet, en revanche, ne peut prendre d’autre forme qu’électorale. Et ce pour une simple raison : il en est du président de la république comme du drapeau ou de l’hymne national : on n’y touche pas sans commettre une sorte de sacrilège. Non que la république soit sacrée – je suis royaliste, et donc vous imaginez ce que j’en pense – mais puisque la forme étatique de gestion de la nation française est aujourd’hui la république, alors, le président de la république, qu’on le veuille ou qu’on le regrette, incarne la nation dans sa chair. C’est le fameux mot de Charles de Gaulle « La république, notre royaume de France ».

Qu’un quidam gifle aujourd’hui François Hollande ou Nicolas Sarkozy, cela n’aurait d’implications que privées. Mais en revanche, que le même quidam n’attende pas qu’Emmanuel Macron soit descendu de son trône républicain pour lui asséner une gifle, cela me paraît une insulte faite à la nation. Cette gifle atteint celui qui nous incarne. Donc, elle nous atteint.

Je le répète : je sais que ma position – surtout venant d’un royaliste, qui cria « Montjoie ! Saint-Denis ! » à de nombreuses occasions – offusquera une partie de mes lecteurs. Pourtant, elle me paraît logique. C’est la même logique qui fait qu’un royaliste entrant dans l’armée respectera le drapeau tricolore et La Marseillaise. Ce faisant, c’est la nation que nous respectons. Je ne crois pas qu’une gifle au chef de l’État soit une marque de respect envers la nation.

J’entends aussi pourtant bien évidemment ceux qui m’expliquent que c’est Emmanuel Macron lui-même qui a désacralisé sa fonction, depuis ses selfies de câlins avec des repris de justice dans nos colonies jusqu’à ses gesticulations en compagnie de deux youtubeurs ridicules, en passant par ses photos avec des « artistes » d’un genre très spécial rassemblés à l’Élysée lors d’une fête de la « musique ».

Oui, certes, à la suite de Sarkozy et Hollande qui abîmèrent la présidence à coups de ridicule, Emmanuel Macron, qui avait commencé son quinquennat avec un certain sens du prestige de la fonction, le termine dans un délire post-moderne qui n’en finit pas de nous étouffer.

Mais, pourtant, au-delà du corps d’Emmanuel Macron, il y a celui du président, de celui qui préside, donc, au destin de la France. Et ce corps-là, on ne saurait le gifler sans que la gifle n’atteigne toute la nation.

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