La route fut longue. Plusieurs heures de car jusqu’à Paris. Puis de longues heures d’attente sur la place du Trocadéro. L’occasion de discuter avec des Français d’autres régions. Certains habitant à quelques kilomètres, la plupart ayant, comme nous, pris l’un des 200 cars venant de toute la France : des Bretons, des Toulousains, des Auvergnants, des Catalans, des Normands, des Alsaciens. Des Français de toutes les régions mais aussi de toutes les générations : des retraités aux lycéens. De toutes classes sociales : lycéens, apprentis, salariés du public ou du privé, commerçants, artisans, patrons de PME. La France qui se lève tôt, et qui n’avait donc pas craint de se lever dans la nuit pour venir soutenir Éric Zemmour.

Des Français de tous bords politiques : certains venant du RN, d’autres de LR ; des royalistes et des bonapartistes ; d’anciens Gilets Jaunes et d’anciens de « La Manif Pour Tous » ; beaucoup d’abstentionnistes qui retrouvent le sens de la France et même quelques anciens militants de gauche qui enfin osent voir ce qu’ils voient. La France bleu, blanc, rouge.

Au fur et à mesure que le temps passait, la place se remplissait. Là où l’on pouvait s’asseoir, il fallait se lever. Retrouver un ami demandait de se frayer un chemin. Une foule dense attendait sagement, sans bagarre, sans dégradation, bonne enfant. Lorsqu’elle se retirera, il n’y aura pas eu de vitrine brisée, ni de voiture brûlée et les gendarmes mobiles la regardera passer les mains dans les poches : la France bien élevée.

Puis les premiers orateurs montent à la tribune. Certains, véritables tribuns, enflamment la foule. Rigault, du haut de ses 22 ans, a déjà la maîtrise d’un grand orateur. Nul doute que nous avons là un de nos futurs grands tribuns. Ravier, déjà un géant qui sait non seulement mener des campagnes victorieuses mais aussi enthousiasmer une foule. Cauchy ou Moureau, passés des ronds-points quelconques des périphéries à un rond-point central et ô combien prestigieux. Jean Messiha, qu’une foule bienveillante ne pouvait impressionner, lui qui est habitué à ferrailler seul contre tous sur les plateaux de télévision ; Messiha, la preuve que la droite française peut aimer un immigré pourvu qu’il aime la France. Collard, toujours à l’aise, qu’il soit à la barre d’un tribunal, face à des journalistes, à l’Assemblée ou à la tribune d’un meeting. Peltier, lyrique et enthousiasmant, émaillant son discours d’allusions à de grandes œuvres, récitant Hugo. Bien d’autres encore qu’il est injuste de ne pas citer.

Les discours étaient entrecoupés de clips vidéos retraçant les déplacements d’Éric Zemmour en France, mais aussi de témoignages poignants des parents de victimes de l’immigration sauvage : Marion Courty, 35 ans, Julien Vinson, 44 ans, Nathalie Jardin, 31 ans. Quelques victimes parmi les centaines causées par l’islam jihadiste. Moments d’émotions, de tristesse mais aussi de colère. La tension montait.

Après Peltier venait De Villiers, la droiture incarnée, le chouan toujours debout quand il s’agit de la France. Si l’arrivée du vendéen avait été accueillie d’une immense ovation et d’une marée de drapeau tricolores, ce ne fut rien quand Marion Maréchal arriva. Aucun applaudimètre ne peut mesurer la clameur qui se leva. Jeune femme belle et intelligente, actuellement figure de la maternité, tout homme de droite ne peut qu’en être amoureux et aucune femme française ne réussit à en être jalouse.

Après un dernier clip vidéo, la musique de Immortal, l’hymne choisi pour la campagne, s’éleva et Zemmour s’avança. De son long discours, il y a bien des choses à retenir. Le ton d’abord, inspiré, voire épique. Avec des moments d’émotion vraie, notamment lorsqu’il évoqua des victimes de l’islamisme. Ou quand spontanément la foule entonna une Marseillaise puissante après l’évocation de la mémoire de Lucien Legros, lycéen du Lycée Buffon, fusillé à 16 ans par les nazis pour actes de résistance.

Retenons les messages plus politiques. Les appels à destination de personnalités de la droite : Ciotti, Bellamy, Morano, Wauquiez, Bardella : « J’aurai besoin de vous ». Surtout le message très important aux musulmans. C’est un appel non à renoncer à leur religion qu’il leur lança, mais à accueillir la France comme la France les a accueillis. À apporter leur pierre à l’histoire de la France en faisant leur cette histoire. À accepter comme frère tout Français, en s’assimilant à la culture française : «  L’assimilation, c’est le contraire du racisme : un raciste ne s’inventerait jamais des ancêtres communs avec celui dont il se prétend supérieur ! Il ne proposerait pas de partager sa culture ! L’assimilation, ce n’est pas le rejet d’une partie de soi-même, c’est un enrichissement inouï, ce n’est pas une soustraction, c’est une multiplication. »

Voilà ce que nous avons retenu de marquant de ce meeting et de ce discours : une foule immense, déterminée mais calme, respectueuse des biens et des personnes, une foule française ; des orateurs clamant leur amour de la France, quelle que soit leur origine ; un candidat transcendé par la mission qu’il s’est donné, un journaliste un peu ringard devenu par mystère un meneur charismatique ; un érudit citant de Gaulle, Napoléon, Bernanos ou Péguy entraînant derrière lui des jeunes que l’on pensait perdus pour la culture.

Mais ce n’est pas ce qu’ont retenu la presse et certains politiques. Ils n’ont retenu que 10 secondes pendant lesquelles une partie des dizaines de milliers de participants (100.000 paraît-il, très certainement plus de 60.000) a scandé le slogan « Macron assassin ». J’avoue qu’au moment où il a retenti, je n’ai pas bien compris. Zemmour soulignait à ce moment-là la lâcheté coupable de l’État face au terrorisme. De nombreux autres slogans ont interrompu le discours de Zemmour et des autres orateurs : c’est le jeu d’un meeting. Certains bien plus crus que celui-là, d’autres plus justifiés (aucun journaliste ni aucun politique ne s’est offusqué des « Macron en prison » par exemple ; peut-être parce qu’il est acceptable à leurs yeux ?). Slogan sans doute déplacé, mais fugace et à la signification infiniment moindre que le discours du candidat.

Le proverbe chinois dit que lorsque le sage montre la Lune, l’idiot regarde le doigt. Quand Zemmour montre la grandeur de la France à retrouver, ce n’est pas le doigt que les imbéciles regardent, c’est la crasse sous les ongles. On dira que cette crasse existe. C’est vrai, c’est celle que tout travailleur a du mal à curer après une journée de travail.

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