On ne règle pas ses comptes avec Jupiter. Du moins, pas en face. Ce jeudi, Emmanuel Macron a préféré s’éclipser discrètement plutôt que de faire face à son ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, pour un entretien qui s’annonçait tendu. À la place, c’est François Bayrou, fidèle parmi les fidèles, qui a été chargé d’accueillir le Vendéen en disgrâce. La scène en dit long sur la fébrilité d’un pouvoir qui vacille, incapable d’assumer le débat ou la contradiction.
Retailleau, coupable d’avoir dit la vérité
Bruno Retailleau a eu le tort de dire tout haut ce que beaucoup pensent tout bas : le macronisme n’a jamais été autre chose qu’un costume taillé sur mesure pour Emmanuel Macron. Une coquille vide, sans doctrine, sans enracinement, sans colonne vertébrale. Une rhétorique du “en même temps” devenue synonyme de l’inaction et de la confusion permanente. Le ministre de l’Intérieur n’a pas mâché ses mots dans Valeurs Actuelles : il a dit que le roi est nu. Et pour cela, il est puni.
Un président qui fuit l’affrontement
Le rendez-vous était pourtant prévu. Retailleau devait venir avec ses dossiers, ses sujets brûlants : les refus de l’Algérie de reprendre ses clandestins, les attentats récents, les tensions dans les quartiers… Mais à l’Élysée, on ne veut pas parler de ces sujets-là. Macron préfère fuir plutôt que d’entendre la réalité. Il laisse à Bayrou le soin d’amortir le choc, comme un rempart de cire placé entre le réel et le chef.
Le macronisme, ou l’art de censurer ses propres ministres
La caste présidentielle s’est évidemment mise en branle pour sauver l’apparence d’unité. Élisabeth Borne, sortie du placard politique où elle végète depuis son départ de Matignon, s’est fendue d’une leçon de morale sur « le respect mutuel ». Agnès Pannier-Runacher a enfilé les poncifs sur « le choix de l’action » et « le rassemblement ». On connaît la chanson. Mais ce que ces tartuffes appellent « rassemblement », c’est l’obligation de se taire. Et ce que Retailleau a brisé, c’est l’omerta macronienne.
Retailleau trahi, la droite humiliée
En renvoyant Retailleau dans les bras de Bayrou, Macron humilie délibérément la droite qu’il prétend intégrer. Il rappelle à tous ceux qui auraient encore des illusions que le pouvoir macronien n’est pas un terrain de compromis, mais un jeu de dupes où l’on sert jusqu’à l’usure avant d’être écarté sans ménagement. Retailleau voulait discuter d’Algérie ? Le président préfère tourner la tête. Il voulait parler des menaces islamistes ? Le chef de l’État délègue à Bayrou, dont la mission est de diluer, désamorcer, endormir.
Le crépuscule du monarque
Ce minuscule épisode, à peine une note dans la partition gouvernementale, illustre pourtant la fin d’un cycle. Un président aux abois, cerné par ses propres erreurs, incapable de défendre son bilan, préfère l’évitement à l’autorité. Retailleau, lui, sort grandi : il a eu le courage de dire ce que tant de ministres macronistes pensent, mais n’osent souffler. Et le peuple, lassé de cette monarchie sans majesté, regarde tout cela avec un mélange de mépris et de colère.
Le macronisme n’est pas « mort » — il est déjà en décomposition.