Proche de Jean-Pierre Chevènement, Joachim Le Floch-Imad est professeur de culture générale dans le supérieur. Il publie une tribune libre sur Le Figarovox, dans laquelle il évoque le non-dit de la part de l’immigration dans la chute du niveau scolaire en France. En voici les meilleurs extraits :

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Au regard de la nécessité du sursaut et du rôle d’accélérateur que l’immigration joue dans la crise de notre système éducatif, un état des lieux de ses répercussions devrait s’imposer. L’immigration demeure pourtant l’éléphant dans la pièce, le tabou suprême de la Rue de Grenelle.

Cette incapacité à penser les liens entre les deux sujets s’avère d’autant plus absurde au regard de la réalité de nos établissements. Une récente note de la Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance révèle par exemple une augmentation de 20 % des élèves allophones en un an (près de 80.000 à la rentrée 2021). Cette évolution spécifique s’inscrit dans un contexte d’accélération brutale de l’immigration. 40 % des moins de 4 ans en France sont immigrés ou d’origine immigrée. Près d’un demi-million d’étrangers y entrent chaque année et le nombre de naissance d’enfants dont les deux parents viennent de l’étranger a augmenté de 59 % en vingt ans. 

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Les élèves issus de l’immigration ont 2,4 fois plus de risques que ceux dits « autochtones » de se retrouver parmi les élèves peu performants en mathématiques.

Joachim Le Floch-Imad

Les résultats scolaires des jeunes issus de l’immigration sont tout d’abord nettement inférieurs à la moyenne, ce qui contribue à notre déclassement dans les études internationales. Cela favorise par ailleurs l’hétérogénéité des classes, déjà importante du fait de la massification, et conduit dès lors de nombreux professeurs à aligner leurs exigences sur le niveau des plus faibles. L’ensemble des statistiques à notre disposition accrédite ce constat. Les allophones sont par exemple largement en décrochage en comparaison de leur classe d’âge, et 20 % d’entre eux n’étaient pas scolarisés dans leur pays d’origine. De fortes inégalités persistent au-delà de cette population, comme le montre l’enquête Pisa 2018 en lecture. Les jeunes Français « autochtones ou descendants d’immigrés de troisième génération ou plus » y obtiennent un score très élevé, du niveau de Taïwan et du Danemark, tandis que le score des « enfants d’immigrés » est inférieur de 9 % et celui des «immigrés » de 18 %. Dans le volet 2022 fraîchement publié de cette enquête, le verdict demeure sans appel.

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La France est ainsi devenue l’un des pires pays au monde du point de vue de la discipline en classe, avec de lourdes conséquences sur l’attractivité du métier d’enseignant et sur la capacité de l’institution à transmettre des savoirs.

Ces problèmes spécifiques posés par l’immigration à l’école n’ont rien à voir avec un quelconque « racisme d’État » ou une volonté de reléguer certaines populations. Les réformes des quarante dernières années ont systématiquement été conduites au nom de l’impératif d’inclusion. Et la France met en œuvre une politique généreuse d’investissements dans les réseaux d’éducation prioritaire, largement concernés par le fait migratoire, dont un rapport de 2018 de la Cour des comptes prouve l’inefficacité. À rebours de ces fantasmes, gageons que le problème tient davantage au volume des flux migratoires et à leur nature de plus en plus extra-européenne (en provenance notamment du Maghreb et d’Afrique subsaharienne) et sous-diplômée. Près d’un élève immigré sur deux en France est par exemple issu d’un milieu défavorisé, contre 37 % en moyenne dans l’OCDE. Il faut avoir le courage de dire, sans stigmatiser qui que ce soit, que cette situation n’est plus tenable et qu’un seuil de tolérance a été franchi. L’immigration est certes un facteur parmi d’autres de la crise de l’école, mais elle aggrave l’ensemble des problèmes que connaît celle-ci.

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