Monsieur le Ministre,

La note, diffusée le 27 août par le Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation
(CIPDR) mettait en garde votre ministère quant à une augmentation sensible des situations d’entorses à la loi du
15 mars 2004 sur le respect de la laïcité à l’école.

Cette note fait état de certaines mouvances qui tentent de déstabiliser le principe de laïcité à l’école en s’appuyant notamment sur les réseaux sociaux, pour bafouer la loi de 2004 interdisant le port des signes ou de tenues manifestant une appartenance religieuse dans les établissements scolaires.

Toujours d’après le CIPDR, des influenceurs sur instagram, tik tok ou twitter incitent les jeunes à transgresser la
loi en encourageant :

le port de vêtements marquant une appartenance religieuse,
l’incitation à la prière au sein de l’école,
la participation au « chantage » à la photo de jeunes femmes musulmanes dévoilées
et la menace à l’encontre de certains conseillers principaux d’éducation.

Vous avez d’ailleurs vous-même récemment évoqué une augmentation du nombre de signalements pour port
de tenues religieuses au sein des établissements scolaires.
La note adressée le 16 septembre 2022 aux recteurs, reconnait explicitement, pour la première fois, le caractère
religieux de l’abaya, du gamis (ou khamis) ainsi que de la robe longue noire, en s’appuyant sur la jurisprudence.
Néanmoins, cette note suscite de vives inquiétudes chez les personnels de direction puisqu’elle leur confère
un rôle d’arbitre pour déterminer la nature de la tenue, religieuse ou non, ostensible ou non.

Ainsi, vous demandez aux personnels de direction de déterminer si l’abaya et le gamis sont des vêtements
religieux, et ce en fonction de critères que vous définissez dans cette note telle que la permanence : port quotidien ou la persistance : refus de l’ôter. Les personnels de direction ne peuvent appliquer cette règle de comptabilité hasardeuse, sujette à toutes les interprétations, y compris des juges.

Quid des EPLE où des dizaines de cas se présentent chaque jour ? Qu’en sera-t-il quand nos collègues, seuls devant leur établissement chaque matin seront invectivés, menacés, voire agressés verbalement ou pire physiquement, par des individus sans scrupules ?

Monsieur le ministre, nous refusons que la République nous délèque une telle responsabilité. C’est à l’État de
dire la Loi et les personnels de direction n’ont pas à choisir ou à l’interpréter. Et, c’est bien la loi et elle seule, qui
doit arbitrer cette question. C’est à l’État de dire si oui ou non l’abaya et le gamis sont des signes ostentatoires.
La laïcité est une valeur fondamentale, socle de notre école républicaine, garante de la liberté de conscience de
chacun et d’un enseignement dans l’esprit des Lumières. Au nom de ces principes, nous refusons la moindre
ambigüité sur les règles de laïcité, d’autant plus que la loi de 2004 impose à l’Etat une « vigilance quant à
l’apparition de nouveaux signes, voire à d’éventuelles tentatives de contournement de la loi ».

Le SNPDEN-UNSA demande expressément un texte clair et sans ambiguité qui réglemente le port de ces
tenues dans les établissements scolaires.

Les personnels de direction, convaincus que nous partageons ce même attachement à la laïcité, comptent sur
vous, monsieur le Ministre pour être soutenus dans leurs missions, à commencer par celle-ci.

Au nom de tous les personnels de direction du SNPDEN-UNSA, je vous prie de croire Monsieur le Ministre en notreentier dévouement au service public d’éducation.

Le Secrétaire général du SNPDEN-UNSA
Bruno BOBKIEWICZ