Les retraités, encore et toujours boucs émissaires

Photo : Hector Reyes

Sous couvert d’équité, c’est une mécanique bien connue que la présidente de l’Assemblée nationale vient d’actionner : faire les poches de ceux qui ont travaillé toute leur vie, épargné, transmis ou simplement refusé de dépendre de l’État. Dans une interview aux Échos, Yaël Braun-Pivet agite le chiffon rouge de l’austérité, mais la potion qu’elle prépare n’a rien de républicain : c’est un gloubi-boulga d’égalitarisme fiscal, de matraquage ciblé et de bricolage technocratique.

Qu’importe qu’ils aient contribué toute leur vie, qu’ils aient payé leurs charges, leurs impôts, qu’ils aient cotisé sans faillir, dans la vision du monde de Renaissance, un retraité qui ne touche pas une pension famélique est forcément un nanti. La voilà donc, la nouvelle idée : supprimer l’abattement fiscal de 10 % sur les pensions, cette petite bouffée d’oxygène qui permettait à des millions de retraités d’alléger un peu la douloureuse.


Mais attention, dit-on à Bercy : seuls « les plus aisés » seront concernés. Sauf qu’on sait comment cela fonctionne. Le « plus aisé » d’aujourd’hui, c’est le « propriétaire de sa maison », le « retraité qui part en vacances » ou celui qui « a mis de côté pour ses enfants ». Demain, ce sera tout le monde.

Année blanche fiscale ou lessiveuse sociale ?

Autre trouvaille géniale : l’année blanche. Mais attention, pas celle de Macron en 2017 pour alléger la fiscalité sur les revenus du travail. Non, ici, c’est une année blanche à l’envers : une désindexation en douce, c’est-à-dire un appauvrissement organisé par l’inflation. Désindexer l’impôt sur le revenu, la CSG, les pensions ? C’est tout simplement demander à la classe moyenne de payer plus, sans même avoir le courage d’une loi.

Derrière le jargon technocratique, c’est bien d’un hold-up sur les revenus fixes dont il s’agit. Les actifs s’appauvrissent, les retraités aussi. Et les vrais assistés, eux, continueront de percevoir sans jamais contribuer.

Les “supers héritages” ou l’obsession égalitaire

Parce qu’il faut toujours un méchant dans le tableau, Braun-Pivet exhume les « supers héritiers » — ces 0,1 % qui reçoivent plus de 13 millions d’euros. À en croire la présidente de l’Assemblée, ils ne paieraient que 10 % de droits. Et alors ? Le fisc prend déjà plus de la moitié de certains patrimoines familiaux transmis. Faut-il encore punir la réussite, la transmission, l’enracinement ? Faut-il vraiment faire croire qu’on comblera un déficit de 40 milliards avec quelques successions très riches, au risque de faire fuir capitaux, familles et entreprises ?

Une France sans legs, sans retraite, sans horizon

Tout est cohérent dans ce projet. Il ne s’agit pas d’assainir les comptes publics — ce que personne ne conteste. Il s’agit d’un profond glissement idéologique : transformer les Français en locataires de leur propre vie. Ne pas leur permettre d’épargner, de transmettre, de s’émanciper de l’État. Le vieux rêve technocratique d’un pays où tout le monde dépend de tout le monde, sauf ceux qui tiennent les cordons de la bourse.

Ce que Braun-Pivet appelle “équité” n’est qu’un égalitarisme jaloux : faire descendre les classes moyennes dans la misère pour que l’écart avec les classes assistées ne devienne pas insupportable.

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