Il arrive parfois qu’on me moque gentiment lors des dîners quand je tente d’expliquer que l’une des dates clefs dans la destruction de l’unicité de la France, c’est le 11 septembre 1789, cette soirée durant laquelle, à l’assemblée naissante, on vota pour ou contre le droit de veto intégral du roi et où l’on plaça les « pour » à droite du président de séance et les « contre » à sa gauche. Ce soir-là, non seulement la France inventait les concepts politiques « droite » et « gauche » pour le monde entier, mais surtout elle se fracturait en deux, pour ne plus jamais se retrouver « une ».

On m’opposera que lors de la première guerre mondiale, les tranchées furent l’occasion d’une sorte d’union sacrée. Certes, le sang versé réunit les hommes, mais les idéologies qui s’opposaient en France avant le déclenchement de la grande guerre étaient aussi irréconciliables. On était au pinacle de l’anticatholicisme, on mettait sur fiches dans l’armée les gradés catholiques, et au sortir de la guerre, Clémenceau mit en pièces l’Autriche-Hongrie, dont le catholicisme lui était insupportable.

Depuis lors, les deux moitiés de France ne font que s’éloigner l’une de l’autre. D’un côté, la France fidèle à son Histoire pluriséculaire, à ses traditions, la France qui aime la France, et de l’autre, les modernes, puis les post-modernes, qui considèrent que le pays est né en 1789 (ils parlent de « proto-France » pour évoquer l’Ancien régime) et que tout ce qui fit la France doit être amendé, déconstruit, détruit, brûlé, remplacé par un internationalisme béat dans lequel tout se vaut et où les citoyens sont de braves consommateurs.

Il y a d’un côté les Français qui font des dons aux Amis de Versailles, et de l’autre Jean-Michel Aphatie qui veut raser le palais pour qu’on arrête d’évoquer la grandeur de la France.

Les deux France sont irréconciliables, mais nous avons un avantage : la nôtre est celle qui est inscrite dans les gènes des Français, dans leur chair. En ce sens, le succès du Puy du Fou est intéressant et révélateur. Parlez aux Français de Clovis, de Jeanne d’Arc, de Charette ou du jeune d’Artagnan, leur cœur vibre, et ils se déplacent en masse pour offrir à leurs enfants ce que l’école ne veut plus leur raconter.

La France post-89 a construit quelques prouesses d’ingénierie comme la Tour Eiffel, le Viaduc de Millau, le Pont de Normandie, etc. Mais ce qui fait notre pays, ce sont les siècles de labour, le manteau de cathédrales, le tapis d’abbayes, le semis de châteaux. Ce qui fait notre pays, ce sont les dynasties qui y ont régné, constituées d’hommes et de femmes imparfaits mais passionnés de cette terre si fertile, si belle, bénie des Cieux.

La gauche a tenté pendant des décennies de nous faire croire que la fracture se situait au niveau social. Elle voulait nous persuader qu’il n’y avait aucun rapport entre la France Cyrillus des rallyes et des châteaux, et la France des bistros, du Camembert et du cubi de rouge. Elle avait tort, et ce sont les Gilets jaunes qui l’ont rappelé avec force. Ces deux groupes constituent la même France, et ils chantent ensemble à tue-tête les lacs du Connemara, pendant que les journalistes germanopratins se bouchent le nez.

Notre mission est simple : perpétuer ce que nous avons reçu. Pour cela, il nous faut :

  1. Nous marier précautionneusement
  2. Avoir des enfants
  3. Leur transmettre et leur faire aimer profondément tout le kit politiquement incorrect : la Grande Armée, Louis XIV, saint Louis et les Croisades, Jeanne d’Arc, etc. et même, pourquoi pas, l’extraordinaire épopée des colonies !
  4. Les rendre imperméables à la propagande progressiste, en moquant ostensiblement devant eux et avec eux tout ce qu’elle véhicule, et ce dès le plus jeune âge.

Ainsi, la France éternelle continuera, dans le cœur des enfants de France, pour aussi longtemps qu’il en restera.

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