Pour Jean-Philippe Tanguy, chaque jour où Emmanuel Macron reste en place est une journée de trop. Le président délégué du groupe RN à l’Assemblée sonne l’alerte dans un entretien avec nos confrères du Figaro : la France s’enlise, la majorité vacille, les institutions piétinent, et les électeurs sont trahis. Sa solution ? Une nouvelle dissolution, un an à peine après la dernière, au nom d’un blocage politique orchestré – selon lui – par une « coalition du mensonge » qui s’est liguée contre la victoire électorale de Jordan Bardella.
En filigrane, une thèse bien rodée : le RN a gagné idéologiquement, le peuple l’a déjà choisi, mais le système le retient encore de force.
Tanguy en profite pour relancer l’autre grande revendication du RN : la proportionnelle intégrale, censée mettre fin aux « petits arrangements entre adversaires politiques » et rendre enfin justice aux « millions d’électeurs ignorés ». Une antienne que partage, curieusement, une partie de la majorité présidentielle. Sauf que là où François Bayrou évoque un texte pour 2026, Tanguy réclame la réforme immédiatement, et accuse ses opposants de refuser la démocratie par intérêt de boutique.
Ce serait, selon lui, un moyen de casser la mécanique des désistements, ce « barrage républicain » qu’il juge moribond, hypocrite, et moralement discrédité. Et l’on sent, derrière ses mots, une jubilation froide : le verrou saute, le plafond de verre s’effondre, les digues craquent.
Marine Le Pen inéligible ? Peu importe
Le RN sait faire face, assure-t-il, même si Marine Le Pen venait à être empêchée de se présenter à cause de sa condamnation. « Elle n’a pas besoin d’un siège pour peser », clame Tanguy. Et si certains y voient un affaiblissement, lui y voit au contraire la preuve que la victoire est inéluctable, avec ou sans elle.
Jordan Bardella ? Il reste la figure de proue, l’homme des foules, le présidentiable silencieux qui n’a pas besoin d’un fauteuil à l’Assemblée pour parler au nom du peuple. Le parti, en somme, se présente comme prêt, soudé, et plus fort que ses figures individuelles.
Le RN en campagne permanente
Tanguy déroule une rhétorique offensive, efficace, huilée : Macron ruine la France, la gauche trahit ses valeurs, la droite joue les supplétifs, et seul le RN incarne une alternative cohérente et crédible. Sur tous les sujets – économie, énergie, immigration – le pouvoir « en place » est décrit comme toxique, illégitime, et dépassé.
Rien de neuf dans la méthode : le RN se pose en recours face au chaos et insiste sur l’idée que le temps presse. On retrouve l’image classique du régime à bout de souffle, soutenu par des artifices, contre un peuple trahi.
Une stratégie de tension assumée
En appelant à une nouvelle dissolution, Tanguy joue la carte du choc démocratique, espérant forcer un arbitrage définitif. Il sait que la présidentielle approche, mais préfère l’accélération au statu quo. Et s’il n’y a toujours pas de majorité ? Ce sera aux Français de choisir entre « le sursaut ou la disparition », dit-il. La formule est dramatique, quasi existentielle.
Elle résume bien l’état d’esprit d’un RN qui ne veut plus attendre, qui se sent légitimé par les urnes et légitimé par les sondages, et qui entend désormais pousser la Ve République dans ses retranchements.