Pour la Chancellerie, c’est le tour de passe-passe qui va permettre de « résoudre » sans effort la surpopulation carcérale. Pour les magistrats, c’est le risque de voir récidiver les délinquants, sans éclabousser le monde politique. Depuis le 1er janvier 2023, il est prévu que les détenus bénéficient, de plein droit, de la libération sous contrainte. Ils peuvent donc sortir automatiquement de prison, trois mois avant la fin de leur peine, dès lors qu’ils ont été condamnés à moins de deux ans d’incarcération et qu’ils possèdent un hébergement.

Seules exceptions à la règle : les condamnés pour violences conjugales, pour viols et agressions sexuelles, pour des infractions sur mineurs de moins de 15 ans, sur personnes dépositaires de l’ordre public. Et en l’absence de faute disciplinaire en détention. Sont donc concernés tous les individus ayant écopé d’une peine de prison pour trafic de stupéfiants, pour vol, pour violences – y compris avec armes ou en réunion ou les deux.

Un petit vertige pour les magistrats de l’application des peines: «Nous ne sommes pas devenus juges pour être des robots qui signent des papiers sans appréciation. Si le législateur veut vider les prisons, il n’a pas besoin de nous pour le faire», regrette un magistrat de l’est de la France. Et de plébisciter l’initiative de certaines grandes juridictions «qui ont créé des trames informatiques spécifiques permettant d’intégrer l’avis défavorable des jugesCar il y aura bien un jour un raté avec un détenu qui récidive».

«Vous voyez comme nous allons être considérés par nos trafiquants de drogue qui récidivent à tour de bras», regrette auprès du Figaro ce juge de l’application des peines en région parisienne. Pour lui, «le dispositif fera long feu dès le premier incident, ou bien les magistrats ne manqueront pas de monter les peines pour ne pas être obligés de l’appliquer». De plus, chacun sait que la prison s’imposant quand toute autre mesure a échoué, les casiers judiciaires des détenus sont longs comme le bras.

Print Friendly, PDF & Email