Faure et Mélenchon au chevet du mouvement du 10 septembre : déjà la récupération ?

Illustration : LLP

L’engouement populaire autour du “Bloquons tout” du mercredi 10 septembre 2025 prend de l’ampleur. Issu du mécontentement face au budget austère concocté par François Bayrou — avec suppression de deux jours fériés, gel des retraites et coupes budgétaires massives dans la santé — ce mouvement spontané, né cet été sur les réseaux sociaux, revendique un arrêt total du pays.

Mélenchon en première ligne

Premier à se positionner, Jean-Luc Mélenchon et La France insoumise ont affiché leur soutien dès le 30 juillet via une tribune dans La Tribune Dimanche, soulignant la légitimité des motivations citoyennes tout en prétendant respecter l’autonomie du mouvement. Quelques semaines plus tard, à l’approche de la rentrée, l’appel est reconduit — désormais formulé comme une « offensive populaire » pour renverser le gouvernement.


LFI ne s’en tient pas là : Manuel Bompard, coordinateur du mouvement, pousse à amplifier la pression et à exiger le retrait pur et simple du plan Bayrou. Mélenchon a même prévu une motion de censure dès le début de la rentrée parlementaire.

Le Parti socialiste entre prudence et recherche de position

Dans le camp socialiste, la prudence domine. La porte-parole Chloé Ridel souligne que si le mouvement suscite compréhension et empathie — dans la lignée des Gilets jaunes et de la frustration née d’un style présidentiel jugé “autoritaire descendant” —, la forme actuelle de la mobilisation, floue et fragmentée, oblige à la retenue.

Les écologistes dans une posture intermédiaire

Marine Tondelier, figure des Écologistes, adopte un ton nuancé : elle soutient l’initiative populaire, tout en alertant contre toute tentative de récupération politicienne. À ses yeux, enliser le mouvement dans un agencement de drapeaux politiques serait absurde — les manifestants risqueraient alors de se sentir instrumentalisés.

Et la droite ?

Du côté de la droite, le malaise est palpable. Les Républicains se retrouvent pris en étau : d’un côté, une partie de leur électorat pourrait être tentée par la colère sociale, notamment face aux coupes dans les retraites ; de l’autre, le parti redoute d’apparaître comme un fauteur de troubles au moment où il tente de se repositionner comme alternative crédible à Emmanuel Macron.

Éric Ciotti a condamné les “excès” et les risques de blocage, tout en reconnaissant que les inquiétudes populaires sont fondées. Dans son sillage, d’autres élus LR insistent sur la nécessité de réponses budgétaires plus équitables, sans pour autant cautionner les appels à “bloquer le pays”.

Quant au Rassemblement national, la stratégie est différente : Jordan Bardella observe avec intérêt ce qui se prépare. Officiellement, il ne donne pas de consigne claire, mais en coulisses, certains cadres du RN voient dans cette mobilisation un terreau favorable pour capitaliser sur la défiance envers le gouvernement. Le parti se garde toutefois d’une récupération trop voyante, de peur de transformer une colère sociale diffuse en affrontement politicien direct.

En somme, la droite marche sur une ligne de crête : attentive au grondement du pays, mais inquiète de voir la rue échapper à son influence.

À mi-chemin entre récupération et solidarité

À mi-chemin entre récupération politique et expression légitime d’un ras-le-bol, le mouvement “Bloquons tout” pousse les partis à clarifier leur position. LFI s’est engagée de manière offensive, comme en témoigne sa volonté de greffer le mouvement à ses actions parlementaires, tandis que le PS reste attentiste. Les écologistes oscillent entre soutien affirmé et mise en garde. La droite, elle, observe avec une prudence mêlée d’opportunisme, consciente que ce 10 septembre pourrait redessiner le rapport de force dans le pays.

Le gouvernement, lui, se prépare à la journée du 10 septembre — qualifiée d’ores et déjà de “mauvaise journée”. Certains membres de l’exécutif réajustent leurs agendas, anticipant une journée d’implantation très tendue.

guest
38 Commentaires
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires


La lettre patriote