C’est une décision qui fait froid dans le dos et qui en dit long sur l’état de la démocratie chez nos voisins allemands. En Rhénanie-Palatinat, l’une des régions les plus peuplées d’Allemagne, les socialistes du SPD viennent d’instaurer une mesure proprement orwellienne : tout candidat à un poste dans la fonction publique devra désormais signer une déclaration de loyauté à la Constitution… et surtout jurer n’avoir appartenu à aucune organisation dite « extrémiste » au cours des cinq dernières années. En clair : si vous êtes (ou avez été) membre de l’AfD, vous êtes désormais banni de la fonction publique.
La ficelle est grosse : sous couvert de défendre l’ »ordre démocratique libre », on s’arroge le droit de sélectionner les opinions autorisées et d’exclure ceux qui pensent autrement. Le ministre de l’Intérieur Michael Ebling, fidèle du SPD, ne s’en cache même pas : l’AfD est visée directement, inscrite sur la liste noire tenue par l’Office fédéral de protection de la Constitution. Fin de toute nuance, fin de tout débat. L’AfD est considérée comme une entité à éradiquer, et tant pis si elle rassemble aujourd’hui plus de 20 % des électeurs dans certains Länder.
Imaginons ce que cela voudrait dire en France
Un tel dispositif, transposé chez nous, signifierait tout simplement l’interdiction professionnelle déguisée pour des millions de Français. Que se passerait-il si un futur gouvernement imposait aux enseignants, aux policiers, aux agents de mairie ou aux postiers de jurer fidélité à une vision idéologique de la République, et d’avouer leurs sympathies passées sous peine d’exclusion ? Devrait-on interdire l’entrée dans la fonction publique aux électeurs du RN ou de Reconquête, au prétexte qu’ils menaceraient la République ?
L’Allemagne nous offre là le spectacle inquiétant d’une démocratie qui n’assume plus le pluralisme. Pire : elle renoue avec une logique d’exclusion administrative qui rappelle de bien mauvais souvenirs, dans un pays où le contrôle des opinions a autrefois mené au pire.
La dérive autoritaire des prétendues démocraties
Il faut le dire sans détour : cette mesure n’est rien d’autre qu’un outil de contrôle politique. Loin de défendre la Constitution, elle piétine les principes mêmes de la démocratie libérale, qui suppose l’égalité d’accès aux emplois publics et la neutralité de l’État vis-à-vis des opinions politiques. Mais quand les électeurs ne votent plus comme on le souhaite, alors on invente des dispositifs pour les disqualifier.
Demain, en France, les mêmes justifications pourraient être invoquées. On parlera de « préserver les valeurs républicaines », de « lutter contre les extrêmes », de « protéger la cohésion sociale ». Et peu à peu, sans même qu’on y prenne garde, une partie des citoyens se retrouvera de facto exclue de la vie publique. Non pour ce qu’ils ont fait, mais pour ce qu’ils pensent.
Une démocratie n’exclut pas, elle débat
Ce qui fait la force d’un régime libre, ce n’est pas l’unanimité imposée, mais le respect des oppositions. Si demain, des formations comme l’AfD ou le RN enfreignent les lois ou appellent à la violence, qu’on les sanctionne. Mais tant qu’elles agissent dans le cadre démocratique, les bannir par des moyens détournés revient à violer l’État de droit.
Il est plus que temps de tirer la sonnette d’alarme. Avant les autodafés. Car lorsque les institutions se mettent à sélectionner les opinions « acceptables », ce n’est plus la démocratie qui triomphe. C’est le règne de la pensée unique, au nom du Bien.