Ce mardi 15 juillet, le Premier ministre François Bayrou a présenté les grandes lignes du budget 2026, dans un contexte de fortes tensions sur les finances publiques. Face à un déficit persistant et une dette en constante progression, le chef du gouvernement entend enclencher un tournant budgétaire majeur, en associant rigueur, réductions ciblées et nouveaux prélèvements. Retour complet sur les principales annonces.
Un endettement jugé insoutenable
François Bayrou a introduit sa présentation par un constat sévère : la France est, selon lui, engagée dans une dynamique de surendettement comparable à celle d’un foyer qui vivrait à crédit pour couvrir ses dépenses courantes. « Chaque seconde, la dette de la France augmente de 5000 euros », a-t-il martelé, qualifiant la situation de « malédiction budgétaire ».
Estimée à 116,2 % du PIB en 2025, la dette publique devrait culminer à 118,1 % en 2027, avant une légère décrue à 117,2 % d’ici 2029. Pour enrayer cette trajectoire, le Premier ministre appelle à un « effort collectif » et un changement profond dans la gestion des finances publiques.
Un objectif révisé à la hausse : 43,8 milliards d’euros d’économies
Initialement fixé à 40 milliards d’euros, le volume global d’économies attendu pour 2026 a été porté à 43,8 milliards. Cette révision à la hausse résulte, selon Bayrou, d’une « aggravation de la situation » depuis les dernières projections. Tous les ministères sont concernés par cet effort, à l’exception des Armées et de la charge de la dette. L’État s’engage à ne pas dépenser un euro de plus en 2026 qu’en 2025, ce qui implique le gel de l’essentiel de ses crédits.
Une « année blanche » pour les retraites et prestations sociales
Parmi les mesures phares, le gel des barèmes et prestations figure en première ligne. Concrètement, aucune revalorisation des retraites, allocations ou barèmes fiscaux n’interviendra en 2026. Le Premier ministre a qualifié cette mesure de « temporaire » mais « indispensable » pour redresser la trajectoire budgétaire, évoquant un gain estimé à 7 milliards d’euros.
Cette « année blanche » concerne l’ensemble des Français, sans distinction de catégorie. Les fonctionnaires ne bénéficieront d’aucune revalorisation générale ou catégorielle.
Deux jours fériés supprimés : 8 mai et lundi de Pâques
François Bayrou a également confirmé une mesure symbolique et potentiellement polémique : la suppression de deux jours fériés dès 2026. Sont visés le 8 mai et le lundi de Pâques. Ces dates ont été retenues pour leur faible « rendement économique » et leur concentration dans un mois de mai jugé « peu productif ». L’objectif, selon le chef du gouvernement, est de « faire travailler davantage la nation pour relancer l’activité ».
Cinq milliards d’euros d’économies dans la santé
Le secteur de la santé sera particulièrement mis à contribution, avec 5 milliards d’euros d’économies ciblées. Parmi les principales mesures annoncées :
- Doublement du plafond annuel de franchise sur les médicaments, qui passera de 50 à 100 euros ;
- Sortie partielle du remboursement à 100 % dans le cadre des affections longue durée pour les médicaments non liés directement à la pathologie ;
- Fin du remboursement automatique de matériel (fauteuils, béquilles) en cas de non-usage avéré ;
- Renforcement de la lutte contre les arrêts maladie injustifiés ;
- Campagnes renforcées pour promouvoir la vaccination, notamment contre la grippe.
Une « contribution de solidarité » pour les plus riches
François Bayrou a annoncé l’instauration d’une « contribution de solidarité » ciblée sur les ménages les plus aisés et les grandes entreprises. Les modalités exactes seront précisées à l’automne, en concertation avec le Parlement. En complément, le Premier ministre souhaite revoir l’abattement de 10 % sur l’impôt sur le revenu des retraités, qui serait remplacé par un forfait annuel plafonné.
Les niches fiscales et sociales dans le viseur
Toujours dans une logique d’équité, l’exécutif entend rationaliser les niches fiscales et sociales. Seront ciblées en priorité :
- Les dispositifs devenus obsolètes ou inefficaces ;
- Les avantages à l’extinction ;
- Les exonérations profitant aux très hauts revenus ou aux grandes entreprises.
Bayrou évoque ici une logique de « justice contributive » et de réorientation des dépenses vers les politiques les plus utiles.
Fonction publique : suppressions de postes et recentrage
L’État a également promis de participer à l’effort. Concrètement :
- Un fonctionnaire sur trois partant à la retraite ne sera pas remplacé ;
- Plusieurs opérateurs publics jugés « improductifs » seront supprimés ;
- Entre 1 000 et 1 500 postes devraient être supprimés dans les agences de l’État ;
- Le patrimoine immobilier de l’État sera géré par une société foncière, avec cessions ciblées.
En parallèle, les participations publiques dans certaines entreprises pourraient être réduites pour dégager des marges de manœuvre en faveur de l’innovation et de la recherche.
Lutte contre la fraude : cap sur le recouvrement
La lutte contre la fraude (fiscale, sociale, aux aides, aux soins) figure également parmi les priorités. En 2023, 15 milliards d’euros de fraudes ont été détectés, mais seuls 11 milliards ont été recouvrés. Bayrou veut inverser cette tendance par un plan renforcé, assorti d’une mission parlementaire de suivi.
Simplication administrative : des ordonnances dès l’automne
Le gouvernement veut alléger rapidement les contraintes qui pèsent sur les entreprises. Dès l’été, une liste de simplifications sera dressée, avec des mesures adoptées par ordonnances à l’automne. Objectif : fluidifier les procédures et réduire les délais.
Assurance-chômage et droit du travail : cap sur les négociations
Des négociations sont prévues avec les partenaires sociaux sur deux volets :
- La réforme de l’assurance-chômage, avec la volonté de responsabiliser les demandeurs d’emploi tout en assurant un filet de sécurité ;
- La simplification du droit du travail, afin de faciliter les embauches et permettre aux salariés de « travailler plus s’ils le souhaitent ».
Bayrou insiste sur le principe que « le travail doit redevenir un choix gagnant ».
Sanctions renforcées contre les retards de paiement
Souhaitant protéger les PME, le Premier ministre entend durcir les sanctions contre les entreprises qui paient en retard leurs fournisseurs. Ces pénalités pourront atteindre jusqu’à 1 % du chiffre d’affaires, un seuil jugé dissuasif.
Ouverture politique et appel au consensus
Enfin, François Bayrou a tendu la main aux partis politiques, syndicats, collectivités et citoyens, en leur proposant de « perfectionner » ensemble le budget 2026. Il promet que toutes les contributions « seront examinées sans sectarisme ».
Une épée de Damoclès politique
Malgré son volontarisme, François Bayrou reste lucide sur sa position fragile. « Nous savons que nous sommes à la merci d’une censure », a-t-il reconnu. Mais le Béarnais assure que son gouvernement n’est pas là pour durer, mais pour « changer les choses, même au risque de tomber ».