Plus personne n’embauche, tout le monde attend : la France à l’arrêt

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La France est entrée dans une ère où l’incertitude politique ne se compte plus en mois, mais en années. Dissolutions, remaniements, budgets impossibles, querelles d’ego au sommet de l’État : tout cela finit par avoir un prix. Et c’est l’économie réelle — celle des artisans, des patrons de PME, des entrepreneurs qui se battent — qui le paie.

Dans les bureaux et les ateliers, le mot d’ordre est devenu le même partout : attendre. Attendre que le gouvernement sache où il va. Attendre que les impôts cessent de grimper. Attendre que le cap budgétaire cesse de changer tous les trois mois. Résultat : les recrutements s’effondrent. Selon une enquête publiée par Bpifrance Le Lab et Rexecode, à peine 37 % des dirigeants de petites et moyennes entreprises maintiennent aujourd’hui leurs projets d’embauche — ils étaient 50 % il y a encore un trimestre. Dix points de moins en trois mois : un effondrement pur et simple.


Pour Catherine Guerniou, patronne d’une entreprise du bâtiment en région parisienne citée par nos confrères du Figaro, la situation résume l’état d’esprit général : « On voulait recruter, mais on a préféré patienter. On ne sait plus à quelle sauce on sera mangés. » Cette phrase, simple et lucide, dit tout : dans un pays où les décisions économiques sont suspendues à la météo politique, l’audace entrepreneuriale s’éteint doucement.

Le chômage, lui, repart à la hausse. 7,7 % de la population active selon l’Insee, soit 44 000 chômeurs supplémentaires en trois mois. Depuis un an, 119 000 Français ont perdu leur emploi. On nous expliquait que la reprise était solide : elle ne tenait, visiblement, qu’à la patience du tissu économique. Et cette patience, aujourd’hui, s’épuise.

Les entreprises de taille intermédiaire ne sont pas épargnées. Le baromètre PME-ETI Grant Thornton montre que seules 2 % d’entre elles envisagent encore de recruter. Du jamais-vu depuis 2020. L’immense majorité préfère geler les effectifs. Non pas par manque d’envie ou de projets, mais parce que le climat politique rend tout engagement risqué. Dans un pays où chaque réforme se termine dans la rue et chaque vote au Parlement dans le chaos, qui oserait encore embaucher ?

Les dirigeants interrogés sont clairs : 62 % estiment que la situation politique aura un impact négatif majeur sur leur activité. Autrement dit, la confiance est morte. Et rien, pas même la nomination d’un nouveau Premier ministre, n’a suffi à la ranimer. Le « débat budgétaire consternant » évoqué par plusieurs patrons ne fait qu’aggraver les choses. Pendant que les élus rivalisent de fiscalité inventive, les chefs d’entreprise cherchent désespérément de la stabilité. Ce n’est pas la politique qui les empêche de vendre, disent-ils, mais bien le désordre permanent qu’elle entretient.

Les Français ont longtemps cru que la politique n’avait qu’un rapport lointain avec leur vie économique. Erreur : quand les gouvernements changent de ligne tous les six mois, quand le Parlement s’enlise dans des querelles d’ego, quand la seule constante de la politique économique reste la hausse des taxes, c’est tout le pays qui ralentit.

La France n’a pas besoin de nouveaux slogans, mais d’un État prévisible. Ce mot, « prévisible », sonne comme un luxe dans la République des crises permanentes. Tant qu’il manquera, nos entrepreneurs continueront de lever le pied, nos jeunes chercheront ailleurs, et notre chômage poursuivra sa lente remontée.

Car au fond, ce n’est pas seulement la politique qui est instable. C’est le pays tout entier qui s’habitue à vivre dans le brouillard.

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