Le conflit ouvert entre l’audiovisuel public et les médias de Vincent Bolloré prend une nouvelle dimension. Après les propos de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, qui a qualifié CNews de « chaîne d’extrême droite », Marine Le Pen réclame son départ pur et simple.
Dans un entretien accordé au Journal du Dimanche, la présidente du groupe RN à l’Assemblée nationale n’y est pas allée par quatre chemins : « Mme Ernotte n’est absolument pas dans son rôle. Ce type de sortie devrait conduire à son départ. » Et d’ajouter : « Il ne revient pas à la patronne de France Télévisions de distribuer des brevets d’honorabilité aux chaînes privées. »
Une neutralité bafouée
Pour Marine Le Pen, le problème est simple : le service public, financé par les Français à hauteur de 4 milliards d’euros par an, se doit d’être irréprochable dans sa neutralité. « La neutralité est exigée du service public, pas des chaînes privées », martèle-t-elle. Autrement dit, qu’il existe des médias d’opinion ne pose pas de difficulté dans une démocratie vivante ; mais qu’un mastodonte payé par l’argent public prenne fait et cause dans le débat politique, voilà ce qui est inacceptable.
Un climat explosif
Cette prise de position s’inscrit dans un contexte de guerre ouverte entre l’audiovisuel public et les médias de la galaxie Bolloré, exacerbée par l’affaire dite « Legrand-Cohen ». Deux journalistes du service public y apparaissent en discussion avec des responsables socialistes, relançant les accusations de collusion idéologique. Tandis que Radio France et France Télévisions dénoncent une « campagne de dénigrement » de la part de CNews et d’Europe 1, les critiques sur leur manque de pluralisme ne cessent de s’accumuler.
Vers la privatisation ?
Marine Le Pen en tire une conclusion politique nette : « Une grande démocratie comme la France n’a aucune raison de dépenser 4 milliards par an pour un mastodonte médiatique partisan. » La présidente du groupe RN plaide pour la privatisation de l’audiovisuel public, rejoignant ainsi une proposition ancienne de sa formation.
Delphine Ernotte, reconduite à la tête de France Télévisions pour un troisième mandat, a voulu se poser en rempart contre ce qu’elle appelle la « presse Bolloré ». Mais en franchissant le Rubicon sémantique – qualifier une chaîne concurrente d’« extrême droite » –, elle a offert à Marine Le Pen un boulevard politique. La patronne du RN l’a bien compris : loin de se contenter de dénoncer un dérapage, elle en fait le symbole d’un service public devenu militant.