Velvet : le TGV privé qui veut détrôner la SNCF… à grands renforts de storytelling

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Velvet. C’est doux, c’est chic, c’est vendeur. Ça évoque les coussins moelleux, les promesses feutrées d’un avenir meilleur, la modernité qui se veut sexy. Mais derrière ce nom aux accents de start-up sous caféine, se cache une réalité bien plus rugueuse : une attaque frontale contre le monopole historique de la SNCF, conduite non pas par un collectif d’usagers mécontents, mais par un mastodonte financier dopé à l’argent des fonds d’investissement.

Levée de fonds d’un milliard d’euros ? Check. Commande de douze rutilants TGV chez Alstom ? Check. Couleurs inédites (vert et lilas !) pour capter l’air du temps ? Check. Et un joli discours sur « l’urgence ferroviaire » pour emballer le tout ? Check. Velvet déroule sa com’ comme une moquette neuve dans un wagon de première classe.


À sa tête, Rachel Picard. Une ex de la maison SNCF qui connaît les rails de l’intérieur. Et qui, désormais, les contourne. Son diagnostic est limpide : les trains sont pleins, les voies sont libres, le réseau est sous-exploité. Et pendant que la SNCF peine à maintenir ses lignes en état, Velvet promet monts et merveilles : des TGV dernière génération, un confort inédit, des prix compétitifs, et une tarification « simple ». Un mot qui, dans la bouche d’un entrepreneur, signifie souvent « assez complexe pour qu’on n’y comprenne rien, mais assez lisse pour que ça passe ».

Mais Velvet ne joue pas seulement la carte du confort ou de la rapidité. Il y a dans son projet une ambition politique larvée : prouver que le service public peut être ringardisé par le privé. Que le monopole de la SNCF est non seulement inefficace, mais dépassé. Qu’en matière de transport, comme en santé ou en éducation, les grandes entreprises sauront toujours mieux faire. À condition de payer.

Car il y a un hic : Velvet devra verser chaque année 200 millions d’euros pour l’usage du réseau — soit 60 % de ses coûts, un péage 2,5 fois supérieur à la moyenne européenne. Autrement dit, l’entreprise privée financera l’infrastructure publique que la SNCF peine à entretenir. La concurrence devient la béquille d’un État impotent. Ironique, non ?

En coulisses, tout le monde applaudit. Alstom engrange les contrats, les sites industriels tournent, la façade atlantique jubile. Mais au fond, la question demeure : ce modèle économique est-il pérenne ? Velvet ne fait-il que reproduire, en plus clinquant, les travers de ses concurrents ? Des trains plus grands, plus rapides, plus verts, mais pour qui ? Et à quel prix ?

On nous promet la révolution ferroviaire. Ce qu’on voit, pour l’instant, c’est la revanche feutrée de la technocratie managériale sur un service public épuisé. Velvet, c’est le rêve d’un rail propre, poli, rentable. Le rêve d’un futur où voyager redevient un luxe bien habillé — mais toujours soumis aux lois du marché.

Et à la fin, devinez qui paiera la note ?

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