On connaissait les procès d’intention, il faudra désormais s’habituer aux tabassages de textile. Vendredi 13 juin, en pleine journée, deux jeunes hommes de 18 et 20 ans ont roué de coups un autre garçon de 18 ans, devant la gare de Laval. Leur motivation ? Son tee-shirt. Oui, son tee-shirt. Il aurait, selon leurs brillantes analyses idéologico-vestimentaires, laissé penser qu’il appartenait à l’ultra-droite. Un vêtement fautif, donc. Un porte-avions y figurait : Charles de Gaulle, très probablement. Le mal était fait.
La scène, filmée, montre une agression d’une lâcheté ordinaire. Plusieurs coups de poing, interrompus par un passant (le seul à sauver l’honneur Lavallois ce jour-là), avant que les deux apprentis miliciens ne prennent la direction de la garde à vue. Là, pas de résistance : les deux délinquants reconnaissent calmement les faits. Un tee-shirt, une gueule qui ne leur revenait pas, une envie de justice expéditive. Il n’en faut pas plus pour faire basculer un après-midi dans la brutalité.
Quand la présomption de droite justifie les coups
Dans une République qui se targue de défendre l’État de droit et la liberté d’expression, la scène a de quoi glacer. L’agression ne s’est pas produite dans une ruelle sombre, mais sur l’esplanade de la gare. Et le motif ne relève ni d’un différend personnel ni d’un accès de folie : il s’agit d’un acte militant. L’un de ces petits lynchages moralisateurs dont certains cercles de gauche se sont fait une spécialité. Le tout au nom d’une « lutte contre l’extrême-droite » qui ressemble de plus en plus à une guerre contre les Français normaux.
L’homme agressé n’a pas souhaité voir de médecin. Peut-être par pudeur. Peut-être par lucidité : à quoi bon demander justice dans un pays où, désormais, être patriote peut vous exposer à un procès de rue ? Le parquet, lui, évoque des « violences sans ITT en réunion ». On aurait aimé qu’il emploie un ton plus grave. Mais dans la France de 2025, on en est là : quand les victimes sont du mauvais bord, on fait dans l’euphémisme.
Le RN s’empare de l’affaire. Et alors ?
Thomas Brisseau, nouveau délégué départemental du Rassemblement national, a osé briser l’omerta : dans un communiqué, il parle d’agression politique, évoque des « militants d’ultra-gauche » et dénonce la violence idéologique. Tollé ? Non. Silence radio. Dans la presse locale, on cite poliment ses propos sans les commenter. Du côté des grandes consciences, c’est motus. Imaginez un instant le scénario inverse : deux jeunes soupçonnés d’être d’extrême droite tabassant un adolescent pour son tee-shirt Che Guevara. L’affaire ferait la une des journaux, l’indignation serait nationale, et le ministre de l’Intérieur parlerait de « milice fascisante ».
Mais ici, rien. Pas un mot de Gérald Darmanin. Pas une ligne dans les éditoriaux. Les antifas ont tabassé un jeune pour un tee-shirt : pas de quoi fouetter un chat. C’est devenu banal. Comme les coups reçus pour une casquette « France », ou les insultes dans les manifs quand vous arborez un drapeau tricolore.
Une justice douce pour les justiciers rouges
Les deux accusés passeront devant la justice le 31 octobre, en « comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité ». L’expression est technocratique, mais la peine sera sans doute symbolique. Après tout, ils ne sont pas fichés S, pas connus des services, pas auteurs d’un « crime de haine » – car dans cette affaire, la haine ne fait pas partie des éléments retenus. Sauf, bien sûr, celle que l’on devine : haine du pays, haine de ses symboles, haine de ceux qui ne pensent pas comme il faut.
Alors non, cette histoire n’est pas « anecdotique ». Elle est emblématique. Elle dit beaucoup de l’époque : une époque où l’on peut frapper en toute bonne conscience, pourvu que ce soit au nom du Bien. Une époque où un tee-shirt suffit à faire de vous un suspect. Et où ceux qui vous cassent la figure peuvent tranquillement plaider l’excuse militante.