La viande la plus consommée en France semble en voie de disparition dans les restaurants scolaires de certaines villes. Et non des moindres.

En France, la viande de porc est la préférée des consommateurs depuis toujours, selon les statistiques disponibles. Elle est appréciée par les enfants, abordable et facile à cuisiner, ce qui en fait une option très populaire. Selon les dernières données de France Agrimer, les Français consomment en moyenne 87,5 kg de viande par an, dont 32 kg de porc, 30 kg de volaille et 23 kg de boeuf, en comptant à la fois les repas à la maison et ceux pris à l’extérieur. Le porc seul représente donc une quantité équivalente à celle de tous les produits de la mer consommés en France (33 kg/an/habitant).

En 2013, l’interprofession porcine Inaporc avait déjà alerté sur la situation préoccupante des producteurs de porc. À Lille, la viande de porc avait été absente des menus tout le mois de septembre. À Séméac (Hautes-Pyrénées, 4 900 habitants), on avait retiré complètement la viande de porc des menus pour toute l’année. Au Havre (Seine-Maritime), 8 500 portions de mousse au chocolat avaient été jetées à la poubelle car pouvant contenir de la gélatine de porc. Dans ces deux derniers cas, il ne s’agissait pas de questions de diététique, mais de gestion de la pratique religieuse. Séméac voulait épargner un surcroît de travail à ses cuisiniers, qui devaient préparer des plats de substitution lorsque la viande de porc était au menu. Au Havre, l’objectif était d’éviter que des élèves musulmans ne consomment de la gélatine de porc à leur insu, même sous une forme ultra-transformée comme les mono-diglycérides d’acide gras.

Dix ans ont passé et la situation ne semble pas s’améliorer pour le cochon, pris en tenaille entre la diététique et la religion. « Nous devinons ce qui se passe, commente Anne Richard, directrice d’Inaporc depuis 2021. Bannir le porc est la solution de facilité… » Une solution mise en œuvre à bas bruit. Contactée, la ville de Lille n’a pas donné suite. Impossible de savoir si cette quasi-disparition du porc répond à des demandes de parents d’élèves, si elle les anticipe, ou si elle est dictée par le souci de simplifier le service, lourd à gérer. « On sert 500 couverts, explique un responsable de cuisine scolaire. On doit passer nos commandes des mois à l’avance, faire du circuit court, du bio, varier les plats, penser aux allergènes, calculer les portions au gramme près et peser les restes pour faire la chasse au gaspillage. Comme on a notre fierté, on tient aussi à ce que les élèves apprécient ! Tout cela avec un budget par repas de 7 € environ, dont 2 € de marchandise, le reste passant en frais divers, salaires, énergie, etc. »

Mais il n’y a pas de grand remplacement.

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