Bruno Retailleau pensait tenir là une mesure de bon sens. Une simple mesure de sécurité élémentaire : permettre à l’État de garder plus longtemps en centre de rétention des étrangers condamnés pour des crimes graves, notamment ceux dont le risque de récidive est élevé. Une réponse attendue, après les multiples faits divers impliquant des individus que la France n’a pas pu ou voulu expulser.
Mais ce jeudi, le Conseil constitutionnel a dit non. Froidement. Sans état d’âme. Le texte voté par les parlementaires et voulu par le ministre de l’Intérieur est partiellement censuré. Motif ? Il violerait le « principe selon lequel la liberté individuelle ne saurait être entravée par une rigueur qui ne soit pas nécessaire ». Pardon ?
Proportionnalité, quand tu nous tiens…
Les Sages estiment que cette prolongation de rétention jusqu’à 210 jours, qui ne concernait pourtant que des personnes condamnées pour des faits lourds (meurtre, viol, trafic de drogue, violences graves), serait « disproportionnée ». Non pas parce qu’elle viserait des innocents, mais parce qu’elle pourrait aussi s’appliquer à des gens dont la menace n’est pas « actuelle ». Autrement dit : un violeur condamné qui a purgé sa peine et qui risque de recommencer… n’est plus, administrativement, un problème.
Autre grief soulevé : la loi ne réservait pas cette prolongation aux cas les plus extrêmes, comme le terrorisme. Voilà donc le Conseil constitutionnel qui s’improvise ministère de la Justice, et choisit de trier lui-même, dans l’urgence, les bons et les mauvais délinquants étrangers.
Quand l’État n’a plus le droit de se protéger
Rappelons qu’un centre de rétention administrative n’est pas une prison. Il s’agit d’un lieu de maintien temporaire, justement destiné à organiser le départ d’une personne étrangère en situation irrégulière, notamment quand celle-ci représente une menace grave pour l’ordre public.
Le message envoyé aujourd’hui par les Sages est donc limpide : même en cas de condamnation pour crime, même si le risque de récidive est élevé, même si la personne n’a rien à faire sur le sol français, l’État n’a pas le droit de la retenir trop longtemps. Car sa « liberté individuelle » prime sur la sécurité des Français.
Le droit, encore et toujours, contre le bon sens
Faut-il rappeler que l’attentat de Mulhouse a été commis par un étranger déjà condamné, libéré, placé en CRA… et relâché faute de pouvoir être expulsé à temps ? Faut-il rappeler que les centres de rétention sont souvent pleins, que les délais administratifs rendent les expulsions quasi impossibles et que les pays d’origine refusent parfois les retours ?
Et pourtant, chaque tentative de renforcer le dispositif se heurte à un mur juridique. Un mur de principes abstraits, appliqués avec une régularité d’horloger mais sans aucun égard pour la réalité du terrain.
Le Conseil constitutionnel nous explique que la France ne doit pas trop embêter les criminels étrangers… au risque d’en oublier qu’elle est d’abord là pour protéger ses citoyens.
La morale de cette décision ? Dans la France de 2025, un violeur étranger récidiviste mérite plus d’égards qu’une victime potentielle.