Dans le premier tome de ses mémoires, consacré à son passage à la Maison Blanche, Henry Kissinger raconte une de ses discussions avec le Général De Gaulle. Nous sommes en mars 1969, et Kissinger demande au grand Charles « Comment pourriez-vous empêcher l’Allemagne de dominer l’Europe ? » Calmement, De Gaulle répond – en 1969 – « Par la guerre ».

Aujourd’hui encore, bien loin de ces solutions belliqueuses, nous devons faire face aux désastres consécutifs à l’attitude de l’Allemagne en Europe et dans le monde.

La Grande-Bretagne n’a jamais caché que le seul aspect qui l’intéressait dans la « construction européenne », c’était le marché ouvert. Malgré cette évidence, l’entrée de la perfide Albion dans le Marché Commun intéressait fortement l’Allemagne et les Pays-Bas, pour contrebalancer l’influence interventionniste de la France. Après deux veto gaulliens dans les années 60, la France accepta finalement l’accession britannique en 1973.

Le Brexit qui arrive désormais à grand pas a au moins un mérite : il remet sur la table la problématique fondamentale de l’Union, la question qui contient toutes les autres : le projet est-il celui d’une Europe d’Etats-nations souverains ou celui d’un super-Etat fédéral ?

Les politiques d’austérité désastreuses imposées il y a une dizaine d’années par Angela Merkel sur des territoires de la zone euro dont l’économie était déjà écroulée, combinées à sa politique de frontières ouvertes à tous les vents des migrations depuis 2015, ont créé un cocktail détonant dont la première conséquence est justement le Brexit.

Pendant que les pays les plus faibles de la zone euro chancelaient et que des voix se levaient en Europe pour appeler à une solidarité européenne, Merkel répondait par un cinglant « Chacun pour soi », ce qu’on pouvait traduire par « Tout pour l’Allemagne », nation qui continuait de profiter de ses excédents commerciaux contre ses « partenaires » européens.

Les conséquences sont connues. Et la première d’entre elles est interne à l’Allemagne : l’AFD est passée de zéro à troisième force politique du pays en cinq ans. Puis, lorsque les Hongrois ont compris que Merkel allait rediriger les nouveaux migrants vers leur pays, Budapest a clairement fait entendre un refus catégorique que ce soit la chancelière allemande qui décide de qui a le droit de s’installer en Hongrie. Ce fut donc au tour de l’Allemagne de se plaindre du « manque de solidarité » de la Hongrie. Ô, ironie !

Puis, vint l’Italie. Puis, la révolte des Gilets jaunes en France, qui n’en finit pas.

Aujourd’hui, l’Italie est à l’initiative d’un nouvel axe avec la Pologne et la Hongrie, et la domination allemande sur le continent est de plus en plus remise en question. Sans que la France ne lui fasse la guerre. Bonne nouvelle.

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