Après divers entretiens à la télévision et à la radio, dans lesquels sont franc-parler a un petit peu surpris, François Bayrou vient d’échapper à plusieurs motions de censure
Pourtant, force est de reconnaître que son chemin est semé de mines : la dette du pays est abyssale, il n’a pas de majorité à l’Assemblée, et le sujet de l’immigration devient de plus en plus brûlant.
L’immigration, justement. Il va bien falloir que quelqu’un prenne un jour le sujet à bras-le-corps, sinon ce pourrait être le peuple qui finisse par s’en occuper, avec les conséquences dramatiques que l’on peut imaginer. Alors le premier ministre a décidé que c’était un sujet qu’il ne voulait plus éviter.
Deux de ses décisions montrent une volonté affichée de s’attaquer au problème : le maintien de Bruno Retailleau à l’Intérieur et la nomination de Darmanin à la Justice. Mais ensuite, au-delà des mots, quels actes ?
Nos confrères du Parisien lui ont consacré un long article ce samedi. Ils y révèlent quelques propos qui intéresseront les lecteurs de La Lettre Patriote :
« Je ne me laisserai pas enfermer dans la seule question du droit du sol et les surenchères qui l’accompagnent. La question pour moi est beaucoup plus large : qu’est-ce que c’est d’être français ? À quels droits et, surtout, à quels devoirs cela ouvre-t-il ? À quoi croyons-nous ensemble ? À quoi adhérons-nous en entrant dans la communauté nationale ? À quoi adhèrent ceux qui naissent français ? Au nom de quelle légitimité devient-on français ? »
« Ce sont des débats essentiels, dont je suis le garant de la bonne tenue. Il n’y aura pas de conflit sur ces sujets à l’intérieur du gouvernement. Ma mission, c’est d’en garantir la justesse et l’équilibre. »
« Cette question mérite d’être traitée selon la méthode à laquelle je crois, qui n’est pas la méthode de l’affrontement systématique. Qui est au contraire la méthode de la compréhension mutuelle. »
« Il n’y a aucun débat qui me gêne. Je n’ai pas de problème à parler de ces sujets. Ce que je ne veux pas, c’est qu’on fasse de ces sujets des sujets d’exaspération. »
« Pourquoi pensez-vous que tout l’Occident est frappé par ces questions ? C’est une remise en cause de tout ce que nous sommes, nous Occidentaux. Il faut les traiter, les comprendre, en parler. »
Le Premier ministre est aussi revenu sur l’affaire de cet influenceur algérien que la France n’a pas encore réussi à expulser et qui a été « récompensé » par la justice rouge.
« Bruno Retailleau a raison de dire qu’il y a un problème. Il a déjà été condamné à plus de dix ans de prison. Si on ne peut pas l’exfiltrer, on a un problème d’efficacité. C’est aussi un problème de loi, puisque les juges disent Moi, j’applique la loi ! »
On l’a compris, François Bayrou n’a pas envie de rester inactif. Il l’explique même clairement à ceux qui pensaient qu’il allait se limiter à faire voter un budget.
« Je veux poser le problème du rôle crucial de l’éducation, de l’efficacité de l’État et des services publics, de la réindustrialisation, de l’aménagement du territoire et de la décentralisation, de la santé, des revenus du travail. Aucun de ces sujets, je ne les laisserai de côté ! »
Enfin, sur son refus d’emménager à Matignon, il s’explique au Parisien en ces mots :
« J’habite toujours chez moi. Je ne suis pas fait pour vivre dans un palais. Les palais sont mortels et vous coupent du monde. Vous ne regardez plus les choses de la même façon quand vous êtes servis. Ce n’est pas la vie ! D’où je viens, il n’y avait pas de serviteur, pas de palais, pas de sous. »
Une chose est d’ores-et-déjà évidente : nous étions habitués aux hommes politiques de droite qui, une fois élus, glissaient subrepticement au centre (ou même à gauche). Chirac ayant été le champion de cette pirouette. Aujourd’hui, force est de constater que c’est l’inverse qui se produit chez François Bayrou : enfin arrivé au pouvoir après des décennies dans la salle d’attente, l’homme a gardé ses méthodes « du centre », mais son diagnostic est bien de droite, ancré dans la réalité.
Nous verrons ce qu’il en fait.