Toc, toc.

J’entrouvre la porte.

C’est Louisette, ma voisine de palier, 82 ans.

Je la croisais de temps en temps dans l’escalier. Toujours en forme, bon pied bon œil.

Comment ça va ?

Beaucoup mieux, mais j’ai cru que j’allais mourir. Il y a trois semaines, j’ai été prise de toux et de fièvre. Trop faible, j’étais sur mon lit. Je me levais juste pour la toilette et manger un tout petit peu, sans appétit. Heureusement mon frigo était plein. J’avais fait mon sac à côté de moi, au cas où… J’ai cru mille fois que j’allais mourir. Vous savez je vis seule et n’ai pas de famille, à part une nièce que je vois une fois par an. Alors les idées noires, je ne vous dis pas. Je transpirais, je m’essoufflais.

Appeler le 15 ? Pourquoi ? Me retrouver au milieu de tous ces futurs cadavres ? Autant mourir chez moi. Au moins je serai dans la dignité et dans mes meubles. On me retrouvera quand ? Dans quelques jours, semaines, mois ? Peut-être des voisins inquiétés par l’odeur alerteront les autorités. Mais viendront-elles ? Je les imagine déjà, masquées de la tête au pied, une lance désinfectante à la main, arrosant à tout va, avant d’approcher de mon cadavre. Oui, il vaut mieux mourir chez soi.

Pourquoi vous n’avez pas appelé ?

À quoi bon, avec le confinement, nous les personnes âgées, sous prétexte de ne pas nous transmettre la maladie, on est traitée comme des pestiférées. Alors, puisqu’il faut mourir un jour…

Print Friendly, PDF & Email